Johan, poursuivi pour avoir enlevé 15 affiches publicitaires de panneaux JCDecaux sur l’espace public, était convoqué aujourd’hui mardi 28 juin pour recevoir le délibéré du procès du 31 mai dernier. Il avait agi dans le cadre de la journée mondiale de lutte contre la publicité du 25 mars, date anniversaire d’un procès gagné par le collectif des déboulonneurs. En 2013, ils avaient été relaxés après avoir barbouillé des panneaux publicitaires, la juge reconnaissant l’état de nécessité. La justice avait reconnu les effets néfastes de la publicité sur la population, générant du stress, de la frustration et du mal-être. Elle avait également reconnu que les personnes poursuivies n’avaient pas d’autres possibilités pour s’en protéger. Nous avons revendiqué le même état de nécessité pour ce procès, le système publicitaire étant le même à Toulouse qu’à Paris.
Johan a lui été condamné à 400€ d’amende et à verser 1100€ à JCDecaux aux titres de dommages et intérêts et remboursement de frais d’avocat.
Ci-dessous, un extrait du verdict :
Attendu que l’article 122-7 du Code pénal dispose : « N’est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace. »;
Que la caractérisation d’un état de nécessité suppose la démonstration de l’existence d’un danger actuel ou imminent et d’un acte non disproportionné nécessaire pour la sauvegarde d’une personne ou d’un bien ;
Que si les articles de presse versés aux débats, et notamment l’article publié le 26 juin 2012 dans le journal Le Monde par plusieurs chercheurs en sciences cognitives et sociales, mettant en exergue le danger intrinsèque aux images publicitaires et à leur action de conditionnement sur le cerveau humain, permettent de caractériser l’existence d’un potentiel danger dans la multiplication des affiches publicitaires, d’autres actions de nature légale permettent de dénoncer ce danger et d’empêcher l’atteinte aux personnes, ainsi de la couverture des affiches de publicité par des bâches, le prévenu précisant par ailleurs à l’audience avoir déjà participé à des actions de ce type avec son collectif.
Que dès lors la commission de l’infraction n’apparaît pas proportionnée au danger relevé notamment en ce qu’elle ne constitue pas le seul moyen de sauvegarder les citoyens de la surpublicité ;
La Cour ne considère donc pas que Johan ait agi en dernier recours. Par cette décision, elle ignore les éléments qui lui ont été présentés lors de l’audience, à savoir que :
– les afficheurs, tels que JCDecaux, n’ont jamais respecté la loi en vigueur en matière d’affichage (à Toulouse par exemple, des dizaines de panneaux illégaux ont été recensés, mais la mairie informée ne fait rien et ne répond pas à nos demandes).
– ladite loi n’est de toute manière pas appliquée. Les instances chargées de contrôler les publicités illégales ne réagissent que sous la pression des tribunaux.
– c’est parfois ces mêmes instances de contrôle qui enfreignent la loi.
Le décision prête d’autant plus à sourire que, la veille du procès, une action de recouvrement (considérée donc par la cour d’ « action de nature légale ») avait été interrompue par une équipe de gros bras de la BAC (brigade anti-criminalité) téléguidée par la mairie.
La lutte continue pour que la justice reconnaisse de manière systématique le droit de se protéger de la publicité, ou que la loi change pour protéger les citoyens.